Outre les secouristes de la Gendarmerie nationale, les membres des unités militaires en entraînement payent de temps à autre un lourd tribut à la montagne, en raison notamment des risques d'avalanche encourus. En septembre 1996, quatre chasseurs alpins du 13e BCA avaient ainsi trouvé la mort en Haute-Maurienne (à la Petite Ciamarella). En janvier 2016, ce sont six légionnaires du 2e REG qui sont décédés en ski de randonnée non loin de là, au col du petit Argentier (près de la station de Valfréjus), pendant un stage. Dans ces deux affaires, des gradés ont été poursuivis devant le juge pénal, avec à la clé des questions diverses (niveau de compétence par rapport aux professionnels civils, degré de risque assumé, manquements dans la préparation et la conduite des sorties, etc.). Et des condamnations ont été prononcées : amendes, mais surtout peines de prison avec sursis (six mois dans le premier dossier [Trib. corr. Chambéry, 22 nov. 1999] ; deux à trois ans dans le second [Trib. corr. Lyon, 20 déc. 2019, appel à venir]).

Les juridictions administratives ont également eu à connaître de litiges survenus dans des circonstances proches et mettant en jeu la responsabilité de l'État : ceci, en cas de fautes non détachables du service (CAA Lyon, 29 mars 2001, n° 97LY00528 : JurisData n° 2001-151672. – TA Grenoble, 20 févr. 1984, inédit. – Confirmant l'incompétence du juge pénal, au sujet d'exercices de tir qui avaient déclenché une avalanche mortelle, Cass. crim., 3 févr. 1987, n° 85-91.598 : Bull. crim. 1987, n° 57, p. 147), voire – par le passé – sans faute (v. à propos d'une avalanche dans le massif du Taillefer ayant emporté des appelés du contingent, CE, 27 juill. 1990, n° 57978 et n° 58621 s. : Rec. CE 1990).

Dans l'affaire du col du petit Argentier, le juge administratif a été saisi du volet disciplinaire. L'adjudant responsable de la course avait en effet écopé de vingt jours d'arrêts et d'une interdiction d'exercer les fonctions de chef de détachement au titre des activités montagne (C. défense, art. L. 4137-2) ; sanction attaquée (en sus du rejet d'un recours hiérarchique) devant le tribunal administratif de Nîmes avec succès. Sur appel de la ministre des armées, la CAA de Marseille – par l'arrêt présenté – annule ce jugement, en ce qu'il considérait que l'autorité disciplinaire avait statué sur le fondement de faits matériellement inexacts. Elle considère avérées les approximations reprochées au sous-officier responsable (concernant la planification, la préparation et la conduite finale de la sortie, ainsi que l'interprétation du bulletin nivologique-météorologique), bel et bien constitutives d'une faute de nature à justifier la sanction, qui n'était donc pas excessive (sur ce contrôle de proportionnalité, F. Melleray, Droit de la fonction publique, Économica, 4e éd., 2017, n° 392).

Source : Veille par Philippe Yolka professeur de droit public (université Grenoble/ Alpes, Master Droit de la montagne)

CAA de MARSEILLE, 7ème chambre, 06/12/2019, 18MA04157

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